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Concours d’écriture « Racontez-nous votre confinement »

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Née à Fontenay aux roses et y habitant toujours, j’y aurai donc vécu deux guerres. L’une, déclarée : alertes, bruits de bottes et bombardements, longues files d’attente chez les commerçants, pour y trouver si peu…

L’autre tellement sournoise, que nul ne l’a vue venir, à part quelques prophètes de malheur qui n’ont pas été écoutés. Mais files d’attente pour acheter encore, et toujours, si peu…

Et je sors à peine de cette 2e guerre, masquée, à petits pas (perdu l’habitude des grands espaces), avec mon masque noir, sous lequel je suffoque, et la peur d’avoir oublié le papier magique « autorisation de sortie-avec-motif » qui n’a plus cours… Ouf pour le papier et les cartouches d’encre au bord de la rupture.

Pendant la 1 e guerre, on avait des infos diverses, suivant ses source d’ informations, radio Londres ou Radio Paris… Mais cette fois ci le choix s’est considérablement enrichi, chaque poste ou chaque chaîne disant tout et son contraire « masques » ? Pas de masques ? quand il n’y en a pas ; c’est plus rassurant de dire qu’ils sont inutiles. Chloro machin, le médicament miracle, ou pas ? Et toujours, cette sinistre comptabilité des morts, pour clore les infos, Hélas, ça ne les ressuscitera pas, mais ça vous mine le moral.

Abandonnant les infos, je finis, parfois, par me tourner vers « Gulli » Chaîne peu traumatisante. Tant pis pour ma culture !

Gavée de mauvaises nouvelles, et de « bon films », des « tontons flingueurs » à « la 7e compagnie » j’ai révisé tous mes classiques.

Pour changer d’horizon, à défaut de pouvoir sortir, j’enchaîne sur mon ordinateur, zappant sur les nouvelles du covid, incapable de faire un choix lucide sur les flots culturels proposés, concerts, conférences visites (virtuelles) de musées. Pas besoin de chercher un banc ou se poser, pour récupérer un peu, mais pas non plus la possibilité de voir tout ce qu’on souhaiterait voir… J’ai tout de même visité, a peu de frais, collections curieuses et hétéroclites, le Mucem, dont la réalisation m’intriguait beaucoup. Et quelques musées français et étrangers, hors d’atteinte

Pour me servir de toutes les possibilités d’Internet, j’ai levé mon verre sur Skype, avec la famille et les amis. C’est sérieusement compliqué de se passer les gâteaux à apéritif, et on se lasse du virtuel !

Lassée de tout, j’ai encore deux possibilités pour tuer le temps : passer l’aspirateur (ça, ce sera vraiment les dernières cartouches) ou téléphoner à ce merveilleux organisme qu’est le C E S U pour essayer de comprendre le qui, que, quoi, donc ?… Bref la conduite à tenir, comment payer « ma fée du logis » qui n’est pas venue travailler, pour cause de confinement… Occupation toute trouvée qui peut largement vous occuper une demi-journée, voire plus, et encore, succès non garanti !

Reste encore le jardin, qui retourne à l’état sauvage, mais il y a des interventions nécessaires, bien au-dessus de mes capacités, je regarde les haies qui montent vers le ciel, le passage entre les buissons qui se referme, le Fontenay d’autrefois, si vert et si touffu est revenu…

Personne « à risque » vu mon âge, je ne sors plus, je vais devoir tenter les commandes par Internet. Je ne suis pas manchote, mais j’ai « pris le progrès en marche » et ne suis pas trop à l’aise avec cet engin magique, et parfois détestable, l’ordinateur… Je me connecte sur le catalogue des supermarchés, à la recherche de produits qui vont me faire rêver quelques instants, lassée que je suis, des pâtes et du riz. Je fais laborieusement mon choix, c’est long et complexe : sur certaines listes, vous avez un baril de lessive qui débarque au milieu des légumes, et quand vous cherchez « lessive » elle a disparu.

Je vous épargne la rubrique « papier toilette (en rupture de stock) » qui a été le meilleur thème de plaisanteries, de cette période étrange… Denrée rare et précieuse ?

Après un long moment studieux, j’arrive, enfin à « commander ».

Calamité ! plus de créneau disponible que ce soit en « drive » ce que je veux et dois éviter… ou en « livraison ». Là, c’est carrément mission impossible. « Désolés nous ne pouvons plus assurer de livraisons avant… Les calendes grecques. » Ce n’est pas exactement la réponse, mais comme entre temps mon panier s’est vidé et ma commande, fruit d’un dur labeur, a disparu…je me roule par terre, en pleurant, et retourne me faire cuire (même pas un œuf, je n’en ai plus !) des pâtes, des pâtes, beurk !

Plusieurs tentatives, tôt le matin, tard le soir, en changeant de fournisseurs, même résultat : je dois être la reine-des-gourdes, et vais devoir demander l’aide, très généreusement proposée, de mes voisins.

Je dois avouer que lorsque j’avais un trou dans mon emploi du temps surchargé, consistant surtout à compléter ma culture en lisant les blagues qui circulaient sur internet et en téléphonant aux amis, j’ai refait de nouvelles tentatives de commandes, histoire de rêver un peu… Cette période était une occasion unique de me retrouver filiforme : Raté, comme toute la France moyenne, j’ai grossi…

Il y a eu des confinements constructifs, il semblerait que le bilan du mien…

Marie-Hélène Boulestreau (87 ans)

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