Le rituel de la rentrée

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Des mines bronzées. Des dossiers neufs. Une cour de l’école, euh de l’Élysée, bien balayée, et les marronniers qui commencent à jaunir. Mais oui, c’est la rentrée ! « Des débuts décevants ». « Envisager une réorientation ». « Des difficultés mais de la bonne volonté ». A qui peuvent être attribuées de telles appréciations ? Non, non, il ne s’agit pas des bulletins du dernier trimestre qui auraient été oubliés sur un coin du bureau du maître. Les élèves entament une nouvelle année scolaire. Penchons-nous donc sur la rentrée des collectivités.

Communes : se préparer dès aujourd’hui aux examens de mars 2020. En mars 2020, la France va élire ses 520000 conseillers municipaux et ses 35000 maires. Bien installé depuis la III° République, le rituel démocratique perdure. Dès cet automne, les grandes manœuvres sont lancées pour conquérir ou garder les grandes villes, avec force alliances et reniements. Dans les territoires, des femmes et des hommes vont se battre pour l’existence même de leur petite ville ou village, de ses services et de ses habitants.

Intercommunalités : surmonter la déception du mode de scrutin. L’élève intercommunalité semble ballotté d’une famille à l’autre. Il gagnerait cette année à se concentrer sur ses compétences et ses projets, plutôt que de geindre en permanence sur son mode d’élection. Maintenant que les regroupements pédagogiques ont eu lieu, il faut bosser !

Départements : se remettre aux travaux de groupe. Le maître note que, malgré ses difficultés, l’élève département fait preuve de bonne volonté. Ou, plus exactement, le maitre peut lui faire payer à peu près ce qu’il veut. Ben oui, il a tellement peur de disparaître qu’il dit amen à tout ce que l’État peut lui refourguer comme dépenses. Le géographe Paul Vidal de la Blache ne se retourne pas (encore) dans sa tombe ! Ses cartes de la France des départements restent accrochées dans les salles de classe. L’élève département gagnerait toutefois à entamer des travaux de groupe et à travailler sur des vrais sujets de fond.

Régions : revoir la méthode d’apprentissage. Avec les nouvelles régions, le maître d’école avait promis de nouvelles compétences, de la clarté des interventions et des économies. Pour le moment, les régions ressemblent davantage à un vase clos qui redistribue… sans moyens supplémentaires. Cette collectivité encore jeune voudrait rayonner sur son territoire. Pas sûr que les moult schémas rédigés durant des semestres entiers y contribuent concrètement.

Pour les examens, rappelez-vous que la France des 36 000 communes n’existe plus depuis l’avènement des communes nouvelles. Pour le matériel pédagogique, les parents ne doivent pas s’inquiéter : l’État décide et les collectivités payent. Après tout, ce n’est qu’une version modernisée de la phrase du Roi soleil : « c’est légal parce que je le veux ». Le jacobinisme aurait-il encore de beaux jours devant lui ? Libre à vous de le penser.

Jean-Luc Boeuf

Ancien DG de Région, departement et commune

2 Commentaires

  1. Michel Giraud

    02/09/2019 à 13 h 38 min

    Il me semble qu’il faudrait aussi, et surtout (?), s’interroger sur l’intérêt de ce mille-feuille administratif, sur les missions des différentes strates, et sur le lien entre “administrés” et services publics… Cf. notamment un article que j’avais rédigé dans le cadre du Grand Débat National : http://michelgiraud.fr/2019/01/26/grand-debat-national-organisation-de-letat-des-collectivites-publiques/

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  2. Gilles MERGY

    02/09/2019 à 14 h 49 min

    J’ai lu avec attention votre contribution au grand débat national.
    Je partage très largement votre analyse.
    Je ne sais pas si on arrivera effectivement à supprimer un échelon.
    A minima, il faut essayer d’éviter d’en rajouter ce qui a été pourtant fait en île de france et il faut éviter les doublons de compétences en clarifiant le « qui fait quoi »
    La suppression de la clause générale de compétences pour les départements et les régions a été un progrès en permettant d’éviter qu’ils interviennent dans tous les domaines. Il faut aussi supprimer le principe de subventions croisées : un projet est co financé par 4 niveaux du mille feuille administratif
    A votre disposition pour en discuter à l’occasion le cas échéant avec JL BŒUF grand spécialiste de ces sujets .
    Gilles Mergy

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